J'ai peur de mon stylo.

[gastair]

Je ne veux pas d'histoire…


Je vadrouille depuis bientôt 30 ans de continent en continent, de conflit en conflit ; dans la poche de la veste de mon treillis, toujours un stylo, jamais le même… ils peuvent un temps résister au froid continental des hivers Balkaniques ou à l'humide chaleur des contrées profondes de la rebelle Afrique, jamais bien longtemps à l'étourderie chronique.

Je suis heureux de ne pouvoir ainsi rattacher aucun souvenir à un objet qui pourrait me suivre fidèlement s'imprégnant d'une histoire qui ne m'appartient pas.

Je ne veux pas d'un objet que j'affectionnerais et qui, vierge d'histoire, épongerait comme un buvard l'encre saumâtre des événements sombres de notre époque. Il pourrait ensuite, je le redoute, la laisser couler de nombreuses années, me tachant de regrets indélébiles.

J'aperçois des visages et j'entends des mots mais rien sur moi n'est encore présent de ces moments pour me dire que cela n'est pas qu'un songe.

Un beau stylo est un instrument artistique et l'art est une âme donnée par l'homme à l'objet. Il est un objet d'où sortent les mots que notre main dirige. Il est un intermédiaire que je veux neutre ; j'aurais trop peur qu'il veuille un jour raconter ses versions. La plume est une fine bouche qui dépose une salive colorées sur des pages avides de ce que je ne veux pas dire.

Je ne voulais pas d'histoire ni passé et ne portait sur moi que des objets sans âme.

J'ai trouvé la parade en un solide stylo gravé d'un message demandé par ma fille. Je suis certain ainsi que les plus sombres moments ne trouveront place dans cette petite âme déja saturée de sentiments.

Mefiez vous de n'avoir sur vous que de bons compagnons, ils pourraient le cas échéant devenir bavard à votre détriment.

Gastair

[jpeg]

J’aime bien ce petit forum aussi parce qu’on y lit des choses comme ça.

J’aime bien l’idée de perdre tout naturellement ses stylos personnels, de ne pas les laisser trop se charger, de ne pas s’encombrer.

Sauf celui gravé « Papa je t’aime ». Là, y aurait penalty !

J

[timanu]

les perdre serait pour moi un vrai drame

Ils sont si liés non pas aux faits mais aux gens qui un jour comme la fille de Gastair ont réunis leurs économies et parfois plus pour m'offrir l'objet convoité.

Les perdre serait indéniablement leur manquer de respect, d'attention en un mot leur claquer la porte au nez!

Ma méthode consiste à les oublier ... un temps. Dès qu'ils deviennent encombrant, trop présents, bref dès qu'ils m'envahissent, je les range soigneusement et les oublient. J'ai toujours à portée de main un bic sans ame ou un plume scolaire et sans facétie qui vient à la rescousse pour lutter contre l'attachement trop fort de certains ...le quotidien fait le reste

Puis au détour de l'ouverture d'un tiroir ou d'une boite la joie de retrouver ou non d'ailleurs un fidèle compagnon oublié là quelques temps parce que trop présent.

[gastair]

J’aime bien ce petit forum aussi parce qu’on y lit des choses comme ça.

J’aime bien l’idée de perdre tout naturellement ses stylos personnels, de ne pas les laisser trop se charger, de ne pas s’encombrer.

Sauf celui gravé « Papa je t’aime ». Là, y aurait penalty !

J

Je vois que tu suis

J'aimerai pouvoir suivre l'histoire de chacun des stylos que j'ai perdus dans ces pays où le cahot règne.
Cela serait, je pense, le début d'une belle histoire...

Dans un genre proche, je vois bien un roman dont l'histoire commencerait par la vie d'un soldat Français en Afghanistan. On suit sa vie, ses peurs, ses joies, ses craintes et, en parallèle la vie de sa famille restée en France.

Familiarisé avec sa vie et son environnement, nous le voyons assis sous un arbre, éloigné de ses camarades pendant une pause repas. Il écrit une lettre à sa famille avec un beau stylo plume. Ce stylo est le fil conducteur de l'histoire ; sa femme le lui offert avant son départ et il est gravé d'un mot doux. La scène s'arrête là sous cet arbre, le noir se fait sur le bruit unique d'une détonation sèche.

Sans lien apparent, on se retrouve dans une petite maison en pierre dans les montagnes Afghanes. Des chèvres, une famille de bergers, un zoom sur un enfant de 6 ans prés de l'âtre. Son père à ramené à la maison un treillis Français, évidant trophée d'un combat.
Se cachant des regards, l'enfant extrait de la poche de l'uniforme un stylo plume, des cartouches d'encre puis une lettre. Il trouve aussi la photo d'une femme et d'une fille de son âge. Il ne comprend pas ce qui est écrit sur ce papier froissé mais la courbe des lettres de cet alphabet qu'il ne connait pas l'intrigue. Il met le stylo dans l'enveloppe et cache le tout derrière une pierre mal sertie du mur de la bâtisse.

Il oubli ce butin pendant des années et poursuit des études qui le mènent à apprendre un temps l'alphabet latin, la courbure des lettres, les pleins, les déliés lui rappellent le pli trouvé des années plus tôt dans les vetements du soldat Français.

Il retourne dans la bergerie de son enfance et retrouve à l'emplacement exact où il l'avait laissé, couverte de poussière, la lettre contenant la photo et le stylo.

Il remet en encre le stylo et trace des lettres d'une écriture qu'il maitrise à peine. Avec l'aide de son professeur, il traduit le texte…

Il n'aura à partir de ce moment de cesse d'aller en France et retrouver la Famille du soldat et leur remettre la lettre et le stylo.

C'est alors l'histoire d'un Afghan pris dans les vicissitudes d'un voyage ou il côtoie les passeurs, les immigrés clandestins dont il ne partage pas la destinée, le froid, la faim, les agressions, l'intolérance et l'incompréhension… Et, une seule inquiétude : perdre le fameux stylo.

Il se retrouve à l'adresse indiquée sur l'enveloppe, frappe, des bruits de pas résonnent à l'interieur et se rapprochent de la porte....

Gastair

[gastair]

les perdre serait pour moi un vrai drame.

Oui, Timanu, ils ne sont plus seulement des objets. Ils sont chargés de ce que l'on y met.
Mais pour moi, c'est un peu comme une musique ou bien une chanson ; elles sont parfois tellement liées à un événement qu'elles peuvent me transporter à l'instant même où je les entends dans un temps révolu précis.

Par exemple, afin de n'avoir pas une sonnerie stressante sur mon portable, j'ai lié une musique de la série 20 des concertos de Mozart aux appels qui sont sensés ne se produire que dans des situations très urgentes.
Et bien je m'en veux beaucoup car à présent ce chef d'œuvre est pour moi un facteur de stress dés que je l'entends dans la vie de tous les jours.

Les objets, les musiques montrent à la mémoire le chemin vers le souvenir.




Gastair

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Si je puis me permettre sans casser l'ambiance, comment voulez-vous ne pas perdre vos stylos dans un pays où le cahot règne ? Désolé, je n'ai pas su résister, je ne le ferai plus ! N'éditez pas votre post pour corriger SVP sinon personne ne comprendra la vanne et j'aurai l'air d'un c... !

Ce que vous écrivez montre parfaitement la charge émotionnelle qui s'attache à ces objets de rien du tout. Il est toujours surprenant de voir tout ce qui tourne autour des plumes.

J

[gastair]

Si je puis me permettre sans casser l'ambiance, comment voulez-vous ne pas perdre vos stylos dans un pays où le cahot règne ? Désolé, je n'ai pas su résister, je ne le ferai plus ! N'éditez pas votre post pour corriger SVP sinon personne ne comprendra la vanne et j'aurai l'air d'un c... !

Ce que vous écrivez montre parfaitement la charge émotionnelle qui s'attache à ces objets de rien du tout. Il est toujours surprenant de voir tout ce qui tourne autour des plumes.

J

Moi qui suis un adepte des théories de la physique dont celle du Chaos.... Une théorie qui fait peur, elle remet en cause la stabilité du monde..... depuis j'arrache les ailes des papillons.

Je n'édite pas, ici comme dans la vie j'assume

Gastair