
A priori, ce modèle n’a rien à voir avec la marque Scribo actuelle mais date du milieu des années 1940 et a été fabriqué par la AB Svenska Reservoirpennfabriken (« La fabrique suédoise de stylo-plume », S.R.F. de son petit nom). Cette dernière a été fondée en 1942 à Strömstad, à l’origine pour palier aux restrictions d’importation de stylo-plumes en Europe. L’idée était de baser toute la production en Suède, des corps en ébonite/celluloïde jusqu’à la plume en or (seul l’osmiridium étant apparemment importé d’Angleterre).

Les modèles (Runa, Scribo et Pennett) étaient de bonne qualité et positionnés assez haut de gamme (le modèle supérieur Runa était vendu à 55 kr alors qu’un Parker 51 se vendait pour 71 kr en 1946). Ils étaient apparemment très inspirés du Balance de Sheaffer mais avec un mécanisme à piston. Même si la marque jouait sur l’attrait du « made in Sweden » (d’où le « Svensk Tillv. » gravé en-dessous de « Scribo »), le succès escompté ne fut pas au rendez-vous, les stylos étant jugés trop chers et tristes par rapport à la concurrence qui affluait après la guerre. En 1947, S.R.F. avait toujours espoir et avait fait construire une nouvelle usine, comptant 75 personnes, mais la production n’a pas pu démarrer immédiatement et la marque fut déclarée en liquidation en 1949. S’ensuivit une discussion animée sur le bien-fondé des nombreuses subventions reçues de l’état…

Pour en revenir au stylo, ce Scribo mesure 136 mm avec capuchon et pèse 20 gr à vide. Le corps avec fenêtre de visualisation est en celluloïde alors que la section et la molette du piston sont en ébonite. Clip et bague sont probablement plaqué or et présentent une teinte rougeâtre assez plaisante qui s’associe bien avec la fenêtre de visualisation ambrée (que ce soit la couleur d’origine ou pas). Le tout donne effectivement une impression de solidité et de qualité, agrémenté d’une belle patine.

La plume en or a un profil que je qualifierais de râblé (nez aplati et épaules larges, descendant en dessous du conduit) et laisse augurer un comportement assez rigide. Elle est marquée de « S.R.F. Scribo 14 KT BOLIDENGULD ». Cette marque « Bolidenguld » faisait partie du concept et assurait l’acheteur que l’or provenait de Suède (Boliden étant une compagnie minière suédoise, toujours en activité aujourd’hui).


Le bout d’iridium est ici particulièrement court et j’imaginais lors de l’achat qu’il avait été raboté un peu drastiquement. Un sujet parfait pour une « stubisation » me disais-je… Mais après lecture des sources et test de la plume je n’en suis plus vraiment si sûr. Si j'ai bien compris, l'osmiridium n'était pas facile à obtenir au début (il est fait mention d'un kilo importé par avion) et initialement les travailleurs étaient « des jeunes du coin » (du moins pour le tournage). L'un dans l'autre cela pourrait expliquer qu'on ait été un peu chiche sur la pointe. Vu le résultat à l’écriture je dirais qu’on se rapproche déjà assez fort d’une « mini-stub » (à noter que le stylo est marqué F). Pas sûr que j’arrive à faire beaucoup mieux que ça en tout cas, surtout vu ce qu'il reste de la pointe.

Niveau démontage, rien de prévu pour l’instant. Le piston aspire l’eau jusqu’à pleine capacité et le joint en liège a l’air étanche donc je croise les doigts. Apparemment le module du piston doit pouvoir être démonté car j'observe un méplat sur le pas vis une fois que la molette est en position pour aspirer l'encre. Mais là est le hic, il y a juste un seul méplat, rien de l'autre côté...
Source : Reservoarpennor - Design, teknik och historie, Magnus Lundberg 2019 (https://magnuslundbergblog.files.wordpr ... ersion.pdf)