J'ai récemment remis la main sur un Capless. Je dis "remis" car je m’étais séparé de mon précédent modèle. C’était un noir mat à la plume large, remarquable mais décidément trop large pour moi. La section était aussi trop large également à mon goût, et me rendait le stylo finalement peu confortable.
Et puis en essayant la version décimo (avec une plume fine, un accent et sans majuscule), j'ai replongé dans le monde du Capless. Et je suis bien content.
Comme j'ai souvent l'occasion de cliquer en réunion en ce moment j'ai observé plus attentivement ce fameux mécanisme, et me suis rendu compte d'un amusant paradoxe qui fait le charme du monde des stylos plume en général et l'objet de discussions passionnées sur fpn.
Chacun sait que la pointe de la plume est la partie la plus sensible de nos stylos. En découle le principe numéro 1 du calamophile : de la plume tu prendras soin. Corollaires et recommandations d'usage : ne pas la faire tomber, éviter de toucher le fond de la bouteille d'encre au remplissage, ne pas écrire sur du papiers abrasif (y compris du papier kraft ?), ne pas se curer les ongles avec, ou quoi ou qu'est-ce...
Alors : pourquoi quand on clique pour sortir la plume, c'est la pointe qui pousse la trappe en frottant dessus, en contradiction totale avec le principe numéro 1 ?
Forcément quelqu'un a déjà pose la question. Forcément un moteur de recherche quelconque saura la retrouver et forcément ça tombera sur fpn. Gagné !
Il y a plusieurs longs fils de discussion sur le sujet, parfois techniques, toujours passionnés (ici et là par exemple). En parcourant rapidement ces discussions, on devine l’émergence de plusieurs types de population :
A) Les inquiets : "Hey, j'ai un beau vanishing point, and ... Oh my God la plume touche! So shocked, j'appelle tout de suite le SAV et je boycotte cette marque à vie". Ces gens ont le mérite de poser des questions qui font réagir les scientifiques et permettent à ces derniers de partager leurs analyses et faire progresser la communauté.
B) Les enquêteurs : "yes, but no. Je vais tout expliquer en détail".
Ils se divisent en deux sous-familles :
B-1) Les traditionalistes, pour qui c'est nécessairement le conduit qui touche en premier car on ne peut pas déroger à la loi numéro 1 (toucher à la plume c'est péché). Donc le conduit commence a appuyer sur le bas de la trappe pendant que la plume avance, puis quand l'ouverture est suffisante, on voit apparaître la plume qui semble toucher mais en fait pas du tout. Parce que.
B-2) Les rationalistes : pour eux c'est bien la plume qui touche. Ils ont fait des schémas, des coupes, des dissections et même des scanners pour démontrer cela. Mais c'est possible car le ressort est souple la pointe est durcie a l'iridium indestructible, et la trappe tapissée a l'intérieur de duvet de licorne tout doux, donc aucun problème pour la plume.
Photos empruntées à leurs auteurs :
(kps, pour qui c'est clair)
(antoniosz qui ne montre pas la plume, mais c'est quand même classe)
Les traditionalistes et les rationalistes ont beau s'échanger leurs arguments, ils paraissent bien difficiles à réconcilier. Pour ma part, une observation attentive du mécanisme me persuade que c’est l’explication la plus simple qui prévaut : la pointe pousse et puis c’est tout.
Fermé :
Ça frictionne un peu ...
Et ça passe :
Et peut-être ainsi finit-on par cheminer vers la dernière catégorie que je n’ai pas encore mentionnée :
C) Leurs membres sont discrets, interviennent généralement une seule fois, au début du débat, avant de se retirer sans prendre davantage part aux hostilités. Je les appelle les sages, qui ont atteint l’éveil et pour qui : "Ce mécanisme a été lancé il y a quasiment 50 ans. Ça fonctionne !"
Tout ça pour dire : c'est un bien beau stylo
