Trois beautés : deux Montblanc 134 et un 136 des années 1940
Posté : 04 janv. 2010 17:36
J'ai découvert cette année les Montblanc anciens. J'étais immédiatement tombé amoureux du 134 de 1948 > essayé ici il y a quelques mois, click
, un merveilleux petit stylo qui ne m'a depuis jamais quitté. J'aime à la folie sa plume au palladium, une des plus belles que j'utilise, sa forme austère et épurée, le toucher merveilleux du celluloid. Logiquement, j'ai donc continué à regarder et à chercher de l'information plus complète sur cette série 13x produite juste avant et après la seconde guerre mondiale, jusqu'à l'arrivée des modèles streamlined toujours produits aujourd'hui, avec l'idée d'acquérir un beau 136 lorsque l'occasion s'en présenterait.
Un bref rappel. Montblanc est une très ancienne fabrique de stylos fondée en 1908 qui a produit une myriade de modèles au fil des années. Les premiers modèles de la série 13x ont été produits à partir de 1937 jusque vers 1950, date à laquelle ils ont été remplacés par les 14x actuels. Le code de cette série 130 est simple : le chiffre des centaines marque le niveau de gamme (1 pour le haut de gamme, le Meisterstück, "Chef d'oeuvre" en français et "Masterpiece" en anglais, on trouve certains modèles destinés à l'export marqués de ces façons, 2 pour le milieu de gamme, 3 pour la gamme économique et les stylos destinés aux étudiants). Le chiffre des dizaines indique le système de remplissage, 0 pour les safety, 2 pour le remplissage à bouton, 3 pour un système à piston. Enfin le chiffre des unités indique la taille, de 2 pour le plus petit à 9 pour le plus gros. Un 136 est donc un Meisterstück, remplissage par piston, taille moyenne. Ces stylos recherchés ont existé en 132, 134, 136, 138 et 139, les rares 138 et les 139 étant très chers aujourd'hui. A noter que ce chiffre de la taille correspond à peu près à celles des Meisterstück actuels, un 136 ancien par exemple est sensiblement de la taille d'un 146, un très gros 139 est de la taille d'un 149.
Les deux stylos dont je vais parler sont un 134 et un 136. J'avais repéré ce 134 en état proche du neuf quand le vendeur m'a également proposé un bon 136 dont je rêvais depuis longtemps, j'ai donc craqué pour les deux. Sur la photo ci-dessous, de bas en haut le 136, le 134, tous les deux c. 1940, et le second 134, modèle "de transition" de 1948 photographié dans l'autre essai.

On remarque tout de suite quelques différences entre les deux 134. Le "transitional" (modèle intermédiaire entre les stylos d'avant-guerre et les nouveaux 14x des années 50) est un tout petit peu plus petit que l'autre 134 de 1940. Le sommet du capuchon est plus court sur celui-ci mais il en a existé des variantes plus longues, l'agrafe en forme de cravate est différente, les bagues de capuchon sont également différentes. Ce 134 de 1948 est entièrement en celluloid, le bouton de piston est caché sous un capuchon à dévisser ("blind cap"). L'empreinte du brevet (DRP...) est presque effacée, la seule bonne empreinte qui subsiste est celle sur le haut du capuchon, en presque parfait état. La fenêtre d'encre striée, obscurcie sur ce modèle, est courte, signe d'un stylo d'après-guerre. La plume qui n'est pas celle d'origine est en palladium. Il est à noter qu'il a existé de nombreuses variantes sur tous ces modèles d'avant et d'après guerre. Différences de matériaux, de capuchon, d'agrafes, de bagues, d'empreintes...
Le 134 de 1940 est en état presque parfait. Il est un peu plus long (voir dimensions plus bas) que l'autre 134 plus récent et le haut du capuchon est également plus long, ce qui lui donne une forme plus élancée. Le corps est en celluloid, cependant que capuchon, sommet de capuchon et bouton de piston sont en ébonite. Les empreintes (DRP - Deutsches Reich Patent - et le n° du brevet, 134 et F, le modèle et la taille de la plume sur le piston, la marque et le modèle sur le capuchon) sont absolument parfaites, encore remplies de leur couleur d'origine. La fenêtre d'encre striée, absolument parfaite, ce qui n'est pas très courant, est une fenêtre longue, marque des stylos d'avant-guerre. Le piston métallique télescopique à joint en liège est à mécanisme direct, sans blind cap. La somptueuse plume fine correspond à l'inscription sur le stylo, c'est la 14 carats d'origine à deux tons avec les habituelles marques Montblanc. Le feed est le feed plat en ébonite classique. La dorure est parfaite sur l'agrafe - dont il a existé plusieurs modèles au fil des ans, celle-ci est typique de l'avant-guerre - et sur la bande unique du capuchon, laquelle n'a aucun jeu. L'étoile en caséine est parfaite, pas jaunie le moins du monde.
Le 136 ressemble beaucoup au petit frère. Lui aussi date d'environ 1940, il est un peu plus gros et un peu plus rebondi. A côté de lui, le 134, celui que je préfère, fait un peu maigriot et mal nourri. C'est également un modèle à longue fenêtre, là aussi parfaitement conservée et transparente, légèrement ambrée. Pas d'empreinte de marque sur la capuchon, seulement l'habituel "Montblanc Meisterstück" joliment strié en diagonale autour du haut, ni de modèle ou de taille de plume sur le piston, seulement le brevet. Différence avec son frère, corps et capuchon sont en celluloid, seules les deux extrémités sont en ébonite. Piston métallique télescopique encore, très grande capacité d'encre comme l'autre. Même agrafe, même bande unique, toutes les deux en parfait état. La bague a un léger jeu sur celui-ci. Le stylo m'a été vendu pour une EF (s..., le peuple-aura-ta-peau !), c'est en fait une bicolore 14 carats M très juteuse, ce qui la fait tirer sur le B. La plume a une courante marque de règle sur son épaule gauche. C'est une plume d'origine, beaucoup de 136 ont plus tard été remontés avec des plumes de 146.

Une partie pas passionnante, mais pour ceux que ça intéresse, on ne les trouve que très rarement, les dimensions et poids et des comparaisons avec des stylos modernes connus. C'est emmerdant comme la mort, mais c'est parfois bien pratique pour qui cherche des repères et n'a jamais vu de ces stylos. Hop. 134 "T" (appellation personnelle) = de transition.
Modèle/Poids à vide avec capuchon/Poids sans capuchon en grammes.
134 "T" 18,7/12,7
134 19,5/14,1
136 22,3/15,8
Pelikan 100N ancien 14,8/9,6
Pelikan M800 moderne 28,6/20,5
Pelikan M400 moderne 14,6/9,4
Les Montblanc sont légers, un peu moins que les "petits" Pelikan anciens ou modernes. J'apprécie beaucoup personnellement les stylos très légers, mais la densité un peu supérieure des Montblanc en fait des objets très plaisants en main. Le M800 artificiellement alourdi pèse un peu plus lourd que le 136, il est un peu plus fatigant pour moi à l'usage.
Modèle/Diamètre du corps 1 cm au-dessus des filets/Diamètre du corps au plus large/Longueur fermé/Longueur du corps sans la plume
134 "T" 11 mm/12 mm/12,4 cm/9,6 cm
134 11,5 mm/12 mm/12,8 cm/10 cm
136 12,2 mm/13 mm/13 cm/10,1 cm
M800 13 mm/13,4 mm/14,1 cm/10,5 cm
Le 136 est seulement un peu plus petit que le Pelikan M800, mais il donne en mains l'impression d'être nettement moins gros et moins lourd. Le 134 de transition est un petit stylo, l'autre 134 est un peu plus conséquent.
Sur l'esthétique. Ces stylos élégants qui vont en s'évasant vers le bouton de piston sont assez massifs et trapus à cause des extrémités tronquées. J'aime beaucoup cette forme et la force que leur procure leur bouts coupés presque net. Ils seront remplacés au début des années 50 par la forme cigare devenue emblématique des Montblanc modernes, mais je préfère nettement cette forme plus anguleuse. On ne rigole pas : ce sont des stylos sérieux, presque austères. Le celluloid noir est une merveille à l'oeil et au toucher, la finition est excellente, ils exsudent la qualité. La fenêtre d'encre ajoute à la beauté simple des stylos. Ils sont pour moi peut-être, dans leur austère harmonie, voire leur conservatisme de forme et de couleur, parmi les plus beaux exemples de stylos faits pour écrire d'abord. A noter pour les amateurs que le très recherché, introuvable et hors de prix premier stylo des séries limitées modernes sur les écrivains, l'énorme Hemingway rouge-orangé et noir, est un pur 139. Si le 134 est celui qui me va le mieux en mains, la forme du 136 est à mon sens un peu plus équilibrée, un peu plus ronde que le 134 à capuchon long.
Et les plumes, qu'elle dit, Bluebird ? J'ai parlé dans un fil récent > ici > de mon amour pour ces plumes allemandes. Je suis fou de celle en Pd du premier 134, la fine de l'autre 134 est aussi belle et encore plus douce. Elle attaque et en même temps elle effleure, on la sent à peine. Juste un souffle. La variation de largeur est magnifique même sous une très légère pression de la main. On se demande en écrivant si on a bien une plume sous la main, si on ne rêve pas. Ces vieilles plumes Montblanc sont connues pour leur douceur et leur qualité, elles volent à une altitude que peu d'autres peuvent atteindre. Ce sont des plumes magiques. J'ai souvent dit le plaisir des vieilles Pelikan, celles-là donnent autant sinon plus de plaisir encore. Le 134 de 48 est rempli de Waterman bleu-noir, celui de 40, le nouveau, de Diamine Umber. Dire encore le plaisir et les qualités des Diamine.
Le 136 a une plume M très juteuse et très flexible, la largeur de trait qu'on peut atteindre est assez impressionnante. Elle est très facile à utiliser sans appuyer. Par goût, je ne raffole pas de ce type de plume, j'aime bien et je m'en accommode pour l'instant, mais si je trouvais aujourd'hui à la changer pour une originale fine voire extra-fine, je le ferais sans hésiter. C'est une plume très douce également. J'ai eu beaucoup de mal à cause de sa largeur et de son débit à trouver une encre qui lui aille : la meilleure de celles essayées est la soyeuse Sailor bleu-noir, au beau bleu fané qui va très bien avec ce stylo ancien. A noter que la Waterman bleu-noir, qui est presque toujours l'encre que je charge en premier dans les vieux stylos, qui est sûre et me sert à voir immédiatement comment ils réagissent ne va pas du tout dans ces deux Montblanc, encore moins dans le 134 que dans le 136.
Je parle ici des Meisterstück de la série 13x, mais les stylos des séries 23x et 33x, moins chers, assez faciles à trouver, sont également de très bons stylos. Je ne devrais pas écrire ça, ça va faire grimper la cote déjà beaucoup trop haute de ces objets très collectionnés et beaucoup trop chers.
Je ne dirai jamais assez le plaisir des stylos allemands. Je suis fou des vieux Pelikan et de leurs belles plumes, ces Montblanc sont merveilleux, mais il y a aussi les Osmia, les Soennecken, superbes, les Kaweco, j'en passe.
J'ai déjà dit que faire des photos m'ennuyait un peu (en passant, j'aimerais poster plus de détails), mais un des plaisirs de ces petits articles est de choix de l'image qui va accompagner les stylos, la recherche de la musique qu'on a dans la tête. Ici deux photos imprimées en hélio de Josef Sudek, le manchot, de la fenêtre de son atelier de Prague dans les années 50.
J'ai indiqué quelques liens et un livre en fin de l'autre article cité en tête de ce message. Il existe un autre livre que je ne connais pas sur les Montblanc des débuts jusqu'à la seconde guerre mondiale : "The Montblanc Diary and Collector's Guide", qui semble assez difficile à trouver.
Comme d'habitude, commentaires, rectifications, ajouts... welcome. Je corrigerai et rajouterai vraisemblablement comme à l'accoutumée des commentaires en cours de route dans le corps du texte
.
Merci aux courageux(ses) qui auront lu jusque là
. En espérant que vous y aurez trouvé des informations utiles.
Jimmy

Un bref rappel. Montblanc est une très ancienne fabrique de stylos fondée en 1908 qui a produit une myriade de modèles au fil des années. Les premiers modèles de la série 13x ont été produits à partir de 1937 jusque vers 1950, date à laquelle ils ont été remplacés par les 14x actuels. Le code de cette série 130 est simple : le chiffre des centaines marque le niveau de gamme (1 pour le haut de gamme, le Meisterstück, "Chef d'oeuvre" en français et "Masterpiece" en anglais, on trouve certains modèles destinés à l'export marqués de ces façons, 2 pour le milieu de gamme, 3 pour la gamme économique et les stylos destinés aux étudiants). Le chiffre des dizaines indique le système de remplissage, 0 pour les safety, 2 pour le remplissage à bouton, 3 pour un système à piston. Enfin le chiffre des unités indique la taille, de 2 pour le plus petit à 9 pour le plus gros. Un 136 est donc un Meisterstück, remplissage par piston, taille moyenne. Ces stylos recherchés ont existé en 132, 134, 136, 138 et 139, les rares 138 et les 139 étant très chers aujourd'hui. A noter que ce chiffre de la taille correspond à peu près à celles des Meisterstück actuels, un 136 ancien par exemple est sensiblement de la taille d'un 146, un très gros 139 est de la taille d'un 149.
Les deux stylos dont je vais parler sont un 134 et un 136. J'avais repéré ce 134 en état proche du neuf quand le vendeur m'a également proposé un bon 136 dont je rêvais depuis longtemps, j'ai donc craqué pour les deux. Sur la photo ci-dessous, de bas en haut le 136, le 134, tous les deux c. 1940, et le second 134, modèle "de transition" de 1948 photographié dans l'autre essai.

On remarque tout de suite quelques différences entre les deux 134. Le "transitional" (modèle intermédiaire entre les stylos d'avant-guerre et les nouveaux 14x des années 50) est un tout petit peu plus petit que l'autre 134 de 1940. Le sommet du capuchon est plus court sur celui-ci mais il en a existé des variantes plus longues, l'agrafe en forme de cravate est différente, les bagues de capuchon sont également différentes. Ce 134 de 1948 est entièrement en celluloid, le bouton de piston est caché sous un capuchon à dévisser ("blind cap"). L'empreinte du brevet (DRP...) est presque effacée, la seule bonne empreinte qui subsiste est celle sur le haut du capuchon, en presque parfait état. La fenêtre d'encre striée, obscurcie sur ce modèle, est courte, signe d'un stylo d'après-guerre. La plume qui n'est pas celle d'origine est en palladium. Il est à noter qu'il a existé de nombreuses variantes sur tous ces modèles d'avant et d'après guerre. Différences de matériaux, de capuchon, d'agrafes, de bagues, d'empreintes...
Le 134 de 1940 est en état presque parfait. Il est un peu plus long (voir dimensions plus bas) que l'autre 134 plus récent et le haut du capuchon est également plus long, ce qui lui donne une forme plus élancée. Le corps est en celluloid, cependant que capuchon, sommet de capuchon et bouton de piston sont en ébonite. Les empreintes (DRP - Deutsches Reich Patent - et le n° du brevet, 134 et F, le modèle et la taille de la plume sur le piston, la marque et le modèle sur le capuchon) sont absolument parfaites, encore remplies de leur couleur d'origine. La fenêtre d'encre striée, absolument parfaite, ce qui n'est pas très courant, est une fenêtre longue, marque des stylos d'avant-guerre. Le piston métallique télescopique à joint en liège est à mécanisme direct, sans blind cap. La somptueuse plume fine correspond à l'inscription sur le stylo, c'est la 14 carats d'origine à deux tons avec les habituelles marques Montblanc. Le feed est le feed plat en ébonite classique. La dorure est parfaite sur l'agrafe - dont il a existé plusieurs modèles au fil des ans, celle-ci est typique de l'avant-guerre - et sur la bande unique du capuchon, laquelle n'a aucun jeu. L'étoile en caséine est parfaite, pas jaunie le moins du monde.
Le 136 ressemble beaucoup au petit frère. Lui aussi date d'environ 1940, il est un peu plus gros et un peu plus rebondi. A côté de lui, le 134, celui que je préfère, fait un peu maigriot et mal nourri. C'est également un modèle à longue fenêtre, là aussi parfaitement conservée et transparente, légèrement ambrée. Pas d'empreinte de marque sur la capuchon, seulement l'habituel "Montblanc Meisterstück" joliment strié en diagonale autour du haut, ni de modèle ou de taille de plume sur le piston, seulement le brevet. Différence avec son frère, corps et capuchon sont en celluloid, seules les deux extrémités sont en ébonite. Piston métallique télescopique encore, très grande capacité d'encre comme l'autre. Même agrafe, même bande unique, toutes les deux en parfait état. La bague a un léger jeu sur celui-ci. Le stylo m'a été vendu pour une EF (s..., le peuple-aura-ta-peau !), c'est en fait une bicolore 14 carats M très juteuse, ce qui la fait tirer sur le B. La plume a une courante marque de règle sur son épaule gauche. C'est une plume d'origine, beaucoup de 136 ont plus tard été remontés avec des plumes de 146.

Une partie pas passionnante, mais pour ceux que ça intéresse, on ne les trouve que très rarement, les dimensions et poids et des comparaisons avec des stylos modernes connus. C'est emmerdant comme la mort, mais c'est parfois bien pratique pour qui cherche des repères et n'a jamais vu de ces stylos. Hop. 134 "T" (appellation personnelle) = de transition.
Modèle/Poids à vide avec capuchon/Poids sans capuchon en grammes.
134 "T" 18,7/12,7
134 19,5/14,1
136 22,3/15,8
Pelikan 100N ancien 14,8/9,6
Pelikan M800 moderne 28,6/20,5
Pelikan M400 moderne 14,6/9,4
Les Montblanc sont légers, un peu moins que les "petits" Pelikan anciens ou modernes. J'apprécie beaucoup personnellement les stylos très légers, mais la densité un peu supérieure des Montblanc en fait des objets très plaisants en main. Le M800 artificiellement alourdi pèse un peu plus lourd que le 136, il est un peu plus fatigant pour moi à l'usage.
Modèle/Diamètre du corps 1 cm au-dessus des filets/Diamètre du corps au plus large/Longueur fermé/Longueur du corps sans la plume
134 "T" 11 mm/12 mm/12,4 cm/9,6 cm
134 11,5 mm/12 mm/12,8 cm/10 cm
136 12,2 mm/13 mm/13 cm/10,1 cm
M800 13 mm/13,4 mm/14,1 cm/10,5 cm
Le 136 est seulement un peu plus petit que le Pelikan M800, mais il donne en mains l'impression d'être nettement moins gros et moins lourd. Le 134 de transition est un petit stylo, l'autre 134 est un peu plus conséquent.
Sur l'esthétique. Ces stylos élégants qui vont en s'évasant vers le bouton de piston sont assez massifs et trapus à cause des extrémités tronquées. J'aime beaucoup cette forme et la force que leur procure leur bouts coupés presque net. Ils seront remplacés au début des années 50 par la forme cigare devenue emblématique des Montblanc modernes, mais je préfère nettement cette forme plus anguleuse. On ne rigole pas : ce sont des stylos sérieux, presque austères. Le celluloid noir est une merveille à l'oeil et au toucher, la finition est excellente, ils exsudent la qualité. La fenêtre d'encre ajoute à la beauté simple des stylos. Ils sont pour moi peut-être, dans leur austère harmonie, voire leur conservatisme de forme et de couleur, parmi les plus beaux exemples de stylos faits pour écrire d'abord. A noter pour les amateurs que le très recherché, introuvable et hors de prix premier stylo des séries limitées modernes sur les écrivains, l'énorme Hemingway rouge-orangé et noir, est un pur 139. Si le 134 est celui qui me va le mieux en mains, la forme du 136 est à mon sens un peu plus équilibrée, un peu plus ronde que le 134 à capuchon long.
Et les plumes, qu'elle dit, Bluebird ? J'ai parlé dans un fil récent > ici > de mon amour pour ces plumes allemandes. Je suis fou de celle en Pd du premier 134, la fine de l'autre 134 est aussi belle et encore plus douce. Elle attaque et en même temps elle effleure, on la sent à peine. Juste un souffle. La variation de largeur est magnifique même sous une très légère pression de la main. On se demande en écrivant si on a bien une plume sous la main, si on ne rêve pas. Ces vieilles plumes Montblanc sont connues pour leur douceur et leur qualité, elles volent à une altitude que peu d'autres peuvent atteindre. Ce sont des plumes magiques. J'ai souvent dit le plaisir des vieilles Pelikan, celles-là donnent autant sinon plus de plaisir encore. Le 134 de 48 est rempli de Waterman bleu-noir, celui de 40, le nouveau, de Diamine Umber. Dire encore le plaisir et les qualités des Diamine.
Le 136 a une plume M très juteuse et très flexible, la largeur de trait qu'on peut atteindre est assez impressionnante. Elle est très facile à utiliser sans appuyer. Par goût, je ne raffole pas de ce type de plume, j'aime bien et je m'en accommode pour l'instant, mais si je trouvais aujourd'hui à la changer pour une originale fine voire extra-fine, je le ferais sans hésiter. C'est une plume très douce également. J'ai eu beaucoup de mal à cause de sa largeur et de son débit à trouver une encre qui lui aille : la meilleure de celles essayées est la soyeuse Sailor bleu-noir, au beau bleu fané qui va très bien avec ce stylo ancien. A noter que la Waterman bleu-noir, qui est presque toujours l'encre que je charge en premier dans les vieux stylos, qui est sûre et me sert à voir immédiatement comment ils réagissent ne va pas du tout dans ces deux Montblanc, encore moins dans le 134 que dans le 136.
Je parle ici des Meisterstück de la série 13x, mais les stylos des séries 23x et 33x, moins chers, assez faciles à trouver, sont également de très bons stylos. Je ne devrais pas écrire ça, ça va faire grimper la cote déjà beaucoup trop haute de ces objets très collectionnés et beaucoup trop chers.
Je ne dirai jamais assez le plaisir des stylos allemands. Je suis fou des vieux Pelikan et de leurs belles plumes, ces Montblanc sont merveilleux, mais il y a aussi les Osmia, les Soennecken, superbes, les Kaweco, j'en passe.
J'ai déjà dit que faire des photos m'ennuyait un peu (en passant, j'aimerais poster plus de détails), mais un des plaisirs de ces petits articles est de choix de l'image qui va accompagner les stylos, la recherche de la musique qu'on a dans la tête. Ici deux photos imprimées en hélio de Josef Sudek, le manchot, de la fenêtre de son atelier de Prague dans les années 50.
J'ai indiqué quelques liens et un livre en fin de l'autre article cité en tête de ce message. Il existe un autre livre que je ne connais pas sur les Montblanc des débuts jusqu'à la seconde guerre mondiale : "The Montblanc Diary and Collector's Guide", qui semble assez difficile à trouver.
Comme d'habitude, commentaires, rectifications, ajouts... welcome. Je corrigerai et rajouterai vraisemblablement comme à l'accoutumée des commentaires en cours de route dans le corps du texte

Merci aux courageux(ses) qui auront lu jusque là

Jimmy