Présentation hf64
Posté : 06 déc. 2023 18:34
Bonjour à tout(e)s
Au terme d’un voyeurisme éhonté, consécutif à mes pérégrinations incognito au sein de votre forum, ma conscience m’enjoint de me dévoiler.
En bref : une carrière de consultant m’a rivé des années durant à mon ordinateur, auquel je dois d’avoir pondu quantité de rapports aussi brillants (à mes yeux) qu’inefficaces (pour les organisations —lesquelles sont d’autant plus inertes et ont la mémoire courte qu’elles sacralisent le changement permanent). Pour compenser ce piètre constat, je me suis lancé dans l’écriture de nouvelles et de romans —sans succès mais peu importe.
A tant écrire, j'ai emprunté les chemins de traverse, ceux de l'écriture cursive, semés d'embûches, pardon, de stylos-plumes.
Aussi, venons-en à notre sujet : le stylo.
Une rapide introspection m’amène à considérer que ma propre fréquentation de vos objets de prédilection tient à plusieurs aspects.
Au début, je possédais un Capless (Namiki) que j’utilisais à mon travail : pratique, fiable, élégant. Puis j’ai découvert les Aurora, et je me suis procuré des 88 et des 98 (Ah, la réserve magique !), avec lesquels j’ai commencé à noircir des pages lors d’entretiens en face à face (à l’inverse de l’écran d’ordinateur, le stylo invite à la proximité : on prend note ou non selon ce qui est dit ou tu, ça permet de doser écoute, relance et marques d’intérêt, de façon explicite au cours de l’échange). De là vient ma première perception que l’outil changeait la donne…
Ces derniers temps, curieux de mieux appréhender l’effet d’un outil sur mes réflexions, je me suis remis à écrire dans des cahiers Clairefontaine. J’ai redécouvert ce lien à nul autre pareil entre la main, la plume et la pensée ; la manière dont l’acte d’écrire et la pensée se modèlent l’un l’autre, calés sur le rythme de la plume bruissant sur le papier, est incomparable. Il y a là quelque chose d’organique, qui procède plus d’une respiration que d’un agencement, ce qui est le cas quand on clavipule des chaines de caractères et que l’on déboîte des bribes pour élaborer des phrases sur un écran avec Word®. Écrire pour penser, ça coule de source ; actionner un clavier, ça produit un patchwork d’items qu’on n’a de cesse de triturer.
Second aspect : mon rapport à l’objet. Je chéris les objets qui me préexistent et me survivront —maisons, voitures, mobilier, appareils de toutes sortes—dans lesquels je peux me couler ou dont je peux faire usage le temps d’un bref passage ici-bas. Je préfère l’ancien, non seulement par goût esthétique, mais surtout parce que j’ai moins de scrupules à faire usage de ce qui est déjà produit. En effet, de plus en plus, m’apparaît comme incongrue la captation d’une ressource vierge, comme qui défricherait un lopin de bonne terre pour y faire construire sa maison, alors qu’au voisinage les logements vides abondent.
Troisième aspect, qu’il me faut avouer : sans être véritablement collectionneur, j’ai toujours eu, par moment, une inclination —disons plutôt des « fixettes »— pour certains objets moribonds mais réanimables : montres kitsch de l’ère soviétique, appareils photos argentiques (6x6)…
Dans cette catégorie, le stylo-plume « vintage » constitue pour moi la quintessence : issu d’un savoir-faire incontestable et d’innovations constantes, objet personnel intime au service de la mise en forme des témoignages et réflexions personnelles de ceux qui ne sont plus, tout à la fois vecteur de mémoire (les écrits) et trace de la personnalité (l’écriture de chacun) et qui plus est : peu encombrant, transportable et accessible financièrement (pas toujours).
Mon addiction calamophilique a franchit un seuil, lorsque, constatant qu’il existaient pléthore de stylos transalpins, je me suis demandé qu’étaient devenues les marques françaises. Je me suis alors lancé dans une petite collection d’espèces fossiles (Baignol, Unic, Stylomine, Edacoto, Bayard, Météore, Gold Starry, Rally, Ludo, Paillard, Mercier, Mallat, Stephens, Old Chap, etc.), en me concentrant sur les stylos celluloïdes avec plume en or. La consultation du forum stylo-plume.org m’a grandement aiguillé et aiguillonné en la matière. Aussi, je privilégie les stylos à pompe ou à levier car je suis en capacité de les restaurer (merci encore le forum). Mais encore : remettre en état de fonctionnement un outil redouble indéniablement le plaisir de s’en servir.
Un temporaire égarement du côté des stylos neufs (Santini, Tibaldi) m’a permis de consolider mes préférences : vive l’ancien et le vintage ! Pourquoi ? Parce que les productions récentes pâtissent d’un mal répandu : l’embonpoint qui gagne nombre d’objets (montres, voitures, bateaux). Cette obésité avérée me semble refléter nombre d’attitudes de l’époque : toujours plus exagérées, hyperboliques, voire prédatrices.
C’est pourquoi j’aime ce qui a vécu ; ce qui est raffiné sans être ostentatoire, bref « l’occasion ». Car l’objet d’occasion, voyez-vous, se déniche plus qu’il ne s’achète. Et surtout, il est occasion d’une rencontre, via l’activation d’un imaginaire que stimule la patine de ce que l’on tient en main. Tandis que l’acte d’achat du neuf n’est, en définitive, que simple appropriation —souvent pulsionnelle— parfois au risque d’une infatuation de l’égo…
Convaincu que nous serions tous malades par nécessité (cf. citation en signature), aux survivants de cette exténuante présentation (la faute à l’ordinateur « patchwork-oriented »), j’adresse mes salutations les plus philostylographiques.
Au terme d’un voyeurisme éhonté, consécutif à mes pérégrinations incognito au sein de votre forum, ma conscience m’enjoint de me dévoiler.
En bref : une carrière de consultant m’a rivé des années durant à mon ordinateur, auquel je dois d’avoir pondu quantité de rapports aussi brillants (à mes yeux) qu’inefficaces (pour les organisations —lesquelles sont d’autant plus inertes et ont la mémoire courte qu’elles sacralisent le changement permanent). Pour compenser ce piètre constat, je me suis lancé dans l’écriture de nouvelles et de romans —sans succès mais peu importe.
A tant écrire, j'ai emprunté les chemins de traverse, ceux de l'écriture cursive, semés d'embûches, pardon, de stylos-plumes.
Aussi, venons-en à notre sujet : le stylo.
Une rapide introspection m’amène à considérer que ma propre fréquentation de vos objets de prédilection tient à plusieurs aspects.
Au début, je possédais un Capless (Namiki) que j’utilisais à mon travail : pratique, fiable, élégant. Puis j’ai découvert les Aurora, et je me suis procuré des 88 et des 98 (Ah, la réserve magique !), avec lesquels j’ai commencé à noircir des pages lors d’entretiens en face à face (à l’inverse de l’écran d’ordinateur, le stylo invite à la proximité : on prend note ou non selon ce qui est dit ou tu, ça permet de doser écoute, relance et marques d’intérêt, de façon explicite au cours de l’échange). De là vient ma première perception que l’outil changeait la donne…
Ces derniers temps, curieux de mieux appréhender l’effet d’un outil sur mes réflexions, je me suis remis à écrire dans des cahiers Clairefontaine. J’ai redécouvert ce lien à nul autre pareil entre la main, la plume et la pensée ; la manière dont l’acte d’écrire et la pensée se modèlent l’un l’autre, calés sur le rythme de la plume bruissant sur le papier, est incomparable. Il y a là quelque chose d’organique, qui procède plus d’une respiration que d’un agencement, ce qui est le cas quand on clavipule des chaines de caractères et que l’on déboîte des bribes pour élaborer des phrases sur un écran avec Word®. Écrire pour penser, ça coule de source ; actionner un clavier, ça produit un patchwork d’items qu’on n’a de cesse de triturer.
Second aspect : mon rapport à l’objet. Je chéris les objets qui me préexistent et me survivront —maisons, voitures, mobilier, appareils de toutes sortes—dans lesquels je peux me couler ou dont je peux faire usage le temps d’un bref passage ici-bas. Je préfère l’ancien, non seulement par goût esthétique, mais surtout parce que j’ai moins de scrupules à faire usage de ce qui est déjà produit. En effet, de plus en plus, m’apparaît comme incongrue la captation d’une ressource vierge, comme qui défricherait un lopin de bonne terre pour y faire construire sa maison, alors qu’au voisinage les logements vides abondent.
Troisième aspect, qu’il me faut avouer : sans être véritablement collectionneur, j’ai toujours eu, par moment, une inclination —disons plutôt des « fixettes »— pour certains objets moribonds mais réanimables : montres kitsch de l’ère soviétique, appareils photos argentiques (6x6)…
Dans cette catégorie, le stylo-plume « vintage » constitue pour moi la quintessence : issu d’un savoir-faire incontestable et d’innovations constantes, objet personnel intime au service de la mise en forme des témoignages et réflexions personnelles de ceux qui ne sont plus, tout à la fois vecteur de mémoire (les écrits) et trace de la personnalité (l’écriture de chacun) et qui plus est : peu encombrant, transportable et accessible financièrement (pas toujours).
Mon addiction calamophilique a franchit un seuil, lorsque, constatant qu’il existaient pléthore de stylos transalpins, je me suis demandé qu’étaient devenues les marques françaises. Je me suis alors lancé dans une petite collection d’espèces fossiles (Baignol, Unic, Stylomine, Edacoto, Bayard, Météore, Gold Starry, Rally, Ludo, Paillard, Mercier, Mallat, Stephens, Old Chap, etc.), en me concentrant sur les stylos celluloïdes avec plume en or. La consultation du forum stylo-plume.org m’a grandement aiguillé et aiguillonné en la matière. Aussi, je privilégie les stylos à pompe ou à levier car je suis en capacité de les restaurer (merci encore le forum). Mais encore : remettre en état de fonctionnement un outil redouble indéniablement le plaisir de s’en servir.
Un temporaire égarement du côté des stylos neufs (Santini, Tibaldi) m’a permis de consolider mes préférences : vive l’ancien et le vintage ! Pourquoi ? Parce que les productions récentes pâtissent d’un mal répandu : l’embonpoint qui gagne nombre d’objets (montres, voitures, bateaux). Cette obésité avérée me semble refléter nombre d’attitudes de l’époque : toujours plus exagérées, hyperboliques, voire prédatrices.
C’est pourquoi j’aime ce qui a vécu ; ce qui est raffiné sans être ostentatoire, bref « l’occasion ». Car l’objet d’occasion, voyez-vous, se déniche plus qu’il ne s’achète. Et surtout, il est occasion d’une rencontre, via l’activation d’un imaginaire que stimule la patine de ce que l’on tient en main. Tandis que l’acte d’achat du neuf n’est, en définitive, que simple appropriation —souvent pulsionnelle— parfois au risque d’une infatuation de l’égo…
Convaincu que nous serions tous malades par nécessité (cf. citation en signature), aux survivants de cette exténuante présentation (la faute à l’ordinateur « patchwork-oriented »), j’adresse mes salutations les plus philostylographiques.
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